C'est Izzy the Bee, mascotte rayée aux grands yeux malicieux, qui nous accueille à l'entrée du sentier nature. Sur un panneau bilingue aux couleurs vives, cette abeille anthropomorphe brandit un mégaphone pour annoncer sa mission : « J'ai élu domicile ici à l'hôtel pour m'assurer que nos actions quotidiennes contribuent à créer un monde plus lumineux et plus bienveillant. » Derrière ce personnage attachant se cache une réalité écologique bien concrète : le Long Beach abrite un véritable observatoire apicole où bourdonnent quelque 61 000 abeilles.
Kissoon, biologiste chevronné et véritable gardien de cette arche de Noé végétale, nous guide d'abord vers les ruches vitrées installées en bordure du parcours. À travers les parois transparentes, on observe le ballet incessant des ouvrières dans leurs alvéoles hexagonales. « Ces pollinisatrices sont essentielles à notre écosystème », explique-t-il avec ferveur. « Sans abeilles, pas de vie. » Le slogan inscrit sur le panneau pédagogique résonne comme un avertissement : « No Sun, No Bees. No Bees, No Life. »

L'observatoire compte six ruches, dont une abritant à elle seule 16 000 individus, tandis que les cinq autres en hébergent chacune environ 45 000. Le miel récolté, aux notes subtiles de poivre rose et de pamplemousse, témoigne de la richesse florale environnante. L'établissement le transforme en délicieuses barres de céréales proposées aux hôtes au petit-déjeuner, bouclant ainsi un cycle vertueux de production locale.
Cartable en bandoulière et regard pétillant, Kisoon nous entraîne ensuite sur le « Biodiversity Journey », ce sentier qui serpente entre une soixantaine d'espèces méticuleusement répertoriées. Dès les premiers pas, le ton est donné. Notre guide s'arrête devant un imposant Polyscias mauritiana, le bois de bœuf endémique, dont les feuilles vernissées captent la lumière avec une intensité particulière. « Regardez cette espèce, elle n'existe nulle part ailleurs sur la planète », explique-t-il avec une émotion contenue. « Autrefois omniprésente dans nos forêts, elle survit aujourd'hui grâce à des sanctuaires comme celui-ci. »
Le parcours dévoile progressivement ses richesses botaniques, classées en trois catégories : endémiques, exotiques et indigènes. Le Dictyosperma album, ce palmier princesse aux allures majestueuses, côtoie le Stadmania oppositifolia, au bois de fer couleur d'ébène. Plus loin, le flamboyant (Delonix regia) déploie son parasol écarlate, rappelant que l'exotisme peut aussi s'acclimater harmonieusement sous les tropiques.
Mais c'est au détour du « Chef's Garden » que l'expérience prend une dimension résolument sensorielle. Kisoon cueille délicatement une feuille de moringa, cette « plante miracle » aux propriétés antioxydantes reconnues. « Les Mauriciens utilisent ces trésors depuis des générations », confie-t-il en froissant entre ses doigts du thyme sauvage, libérant ses essences aromatiques. Romarin, aloès, citronnelle, menthe, gingembre, basilic sacré : le jardin médicinal révèle une pharmacopée naturelle que l'hôtel intègre désormais à sa cuisine, notamment dans un savoureux curry aux bâtonnets de moringa dont la recette figure sur la brochure du parcours.
Cette initiative dépasse largement le simple agrément touristique. Elle s'inscrit dans la « Come Alive Collection » de Sunlife, une philosophie de développement durable symbolisée par les pictogrammes des Objectifs de Développement Durable de l'ONU qui jalonnent discrètement le parcours. Agriculture biologique, préservation de la biodiversité, éducation environnementale, économies d'énergie, lutte contre le gaspillage de l'eau, commerce équitable : le Long Beach s'affirme comme un laboratoire grandeur nature où luxe hôtelier rime avec responsabilité écologique.
Au terme de cette balade d'une heure trente, enrichie des anecdotes savantes de Kisoon sur les vertus du jasmin de nuit ou les secrets du doliprane naturel, on repart avec un regard transformé. Ce bout de paradis mauricien, où chaque espèce végétale raconte une histoire de résilience et où chaque abeille œuvre à la perpétuation du vivant, prouve qu'il est possible de conjuguer excellence touristique et engagement écologique. Une leçon de botanique autant qu'une invitation à repenser notre rapport à la nature.