L’île Maurice confirme son statut d'exception dans l'océan Indien. Tandis que l'Afrique australe traverse une période d'incertitudes économiques et sécuritaires, l'île Maurice s'impose comme un sanctuaire pour les capitaux sud-africains en quête de stabilité. Les derniers chiffres de la Banque de Maurice témoignent d'une dynamique remarquable : les investissements directs étrangers sud-africains dans l'immobilier local ont bondi de 22,6% en 2024, atteignant 4,66 milliards de roupies mauriciennes.
Un modèle de stabilité dans un environnement régional troublé
Cette performance s'inscrit dans un contexte géopolitique où Maurice tire son épingle du jeu. Classée 26e au rang mondial de l'Index de la paix 2025 de l'Institute for Economics and Peace, devançant notamment le Royaume-Uni, la France et les États-Unis, l'île Maurice maintient sa position de nation la plus paisible du continent africain. Un atout considérable face aux défis sécuritaires que connaît l'Afrique du Sud, régulièrement classée parmi les pays les plus violents au monde.
Cette attractivité ne relève pas du hasard. Le modèle mauricien, fondé sur une gouvernance stable, un système juridique hérité de la tradition britannique et française, et une fiscalité attractive, séduit une clientèle fortunée en quête de diversification patrimoniale. "Sa stabilité politique et économique, associée à son accessibilité et sa proximité, rend le pays très attractif pour les Sud-Africains fortunés", souligne Lance Lawson, consultant chez Sovereign Group.
Un marché immobilier en pleine effervescence
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. L'ensemble des flux d'investissements directs étrangers dans l'immobilier mauricien a progressé de 13% en 2024, culminant à près de 24 milliards de roupies. Les acquisitions de propriétés, incluant villas de luxe et appartements, ont totalisé 18,6 milliards de roupies, soit une hausse vertigineuse de 33,8% par rapport à 2023. Ce secteur représente désormais près de 70% des entrées d'IDE à Maurice, faisant de l'immobilier le véritable moteur économique de l'archipel.
La géographie de ces investissements révèle des préférences marquées. Les régions du Nord et de l'Ouest, particulièrement Tamarin et Rivière-Noire, concentrent l'essentiel des acquisitions sud-africaines. Ces zones, prisées pour leur littoral préservé et leurs infrastructures de qualité, attirent une clientèle exigeante en quête d'un art de vivre tropical.
Une stratégie gouvernementale ambitieuse
Port-Louis ne cache pas ses ambitions. Comme l'a déclaré Dhaneshwar Damry, ministre adjoint des Finances, dans une récente interview à Bloomberg : "Nous voulons cibler le segment des ultra-riches". Cette stratégie s'accompagne de mesures concrètes visant à encourager l'installation de "family offices" et une diversification des investissements au-delà du seul secteur immobilier.
Cette orientation s'avère particulièrement opportune au regard des projections démographiques. Selon l'Africa Wealth Report 2024, la population de millionnaires en Afrique devrait croître de 65% d'ici 2033, Maurice figurant parmi les dix pays les plus dynamiques avec une progression attendue de 95%. Un potentiel considérable pour un territoire qui mise sur l'excellence de ses services financiers et la qualité de son cadre de vie.
Les défis d'une réussite
Cette success story mauricienne ne doit cependant pas occulter les défis à venir. L'impact des récentes mesures budgétaires sur ce marché reste à évaluer, tandis que la concentration géographique des investissements soulève des questions d'aménagement du territoire. De plus, la dépendance croissante vis-à-vis d'une clientèle sud-africaine, aussi fortunée soit-elle, expose l'économie mauricienne aux soubresauts politiques et économiques de son puissant voisin.
Néanmoins, Maurice semble avoir trouvé la formule d'un développement économique maîtrisé, alliant attractivité internationale et préservation de son modèle social. Dans un monde en quête de stabilité, l'archipel mauricien offre une réponse pragmatique aux aspirations d'une élite africaine en quête de sérénité. Un modèle qui pourrait bien inspirer d'autres territoires insulaires en quête de repositionnement économique.