Face aux défis les autorités mauriciennes se trouvent confrontées à un dilemme cornélien : faut-il sacrifier les prérogatives d'Air Mauritius, compagnie nationale en difficulté, sur l'autel de la compétitivité touristique ?
Richard Duval, ministre du Tourisme, ne cache pas ses convictions. Dans un entretien accordé à l’Hebdo ce dimanche il plaide ouvertement pour une libéralisation accrue de l'espace aérien mauricien. "Je suis en faveur de l'ouverture de notre ciel", déclare-t-il sans ambages, estimant que la multiplication des liaisons aériennes constitue un préalable indispensable à la renaissance du tourisme mauricien.
Cette position, pour audacieuse qu'elle paraisse, s'inscrit dans une logique économique implacable. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : avec des arrivées touristiques qui peinent à retrouver leurs niveaux d'avant-crise, Maurice ne peut se permettre de maintenir un protectionnisme aérien qui pourrait s'avérer contre-productif.
Les résistances du monopole
Pourtant, cette vision libérale se heurte aux intérêts bien compris d'Air Mauritius, dont la situation financière précaire rend toute concurrence supplémentaire particulièrement redoutable. La compagnie nationale, qui a longtemps bénéficié d'une position dominante sur les liaisons vers l'Europe et l'Asie, voit d'un œil inquiet l'arrivée potentielle de nouveaux acteurs sur ses routes les plus lucratives.
Le débat dépasse les seules considérations commerciales pour toucher aux questions de souveraineté nationale. Car derrière les enjeux économiques se profile la crainte, légitime, de voir Maurice perdre le contrôle de ses connexions aériennes, véritable cordon ombilical de cette économie insulaire.
L'équation touristique
Face à cette équation complexe, le ministre du Tourisme assume ses responsabilités sectorielles. Il rappelle que Maurice demeure tributaire de marchés émetteurs lointains – Europe, Asie, Afrique du Sud – et que la multiplication des options de transport constitue un facteur déterminant dans le choix des destinations par les voyageurs.
Cette approche pragmatique trouve un écho particulier dans le contexte post-pandémique, où la résilience des destinations touristiques dépend largement de leur capacité d'adaptation face aux bouleversements du transport aérien international.
Reste à savoir si Maurice saura concilier les impératifs de compétitivité touristique avec la préservation de ses intérêts stratégiques nationaux. Un défi qui résume, en microcosme, les dilemmes auxquels font face de nombreuses destinations insulaires à travers le monde.